À l’occasion de la sortie de la biographie Claude Miller, une vie de films par Olivier Curchod, la Cinémathèque française présentait du 24 janvier au 9 février une rétrospective consacrée au réalisateur de La Meilleure façon de marcher, Garde à vue et Mortelle randonnée. C’est dans ce cadre qu’ont été projetés le 3 février trois films auxquels Claude Miller a travaillé pendant son service militaire à l’Établissement cinématographique des armées (ECA). La séance était présentée par Gilles Ciment, directeur adjoint de l’ECPAD et le réalisateur Bernard Stora, ami de Claude Miller depuis la prépa Voltaire à l’Idhec.

Le public cinéphile, qui comptait notamment Annie Miller, le cinéaste Luc Béraud et Olivier Curchod, ont pu découvrir trois titres réalisés, en partie réalisés ou préparés par Claude Miller pendant son service militaire à l’ECA où il a été incorporé en novembre 1963 pour une durée de 15 mois.

Olivier Curchod, dans son livre Claude Miller, une vie de films (Les Impressions nouvelles), livre le résultat de sa longue enquête auprès de l’entourage du cinéaste et dans les archives de l’ECPAD, d’où il ressort qu’au fort d’Ivry où il retrouve des amis comme Gérard Pirès, le jeune Claude Miller (21 ans), sorti major de l’Idhec, est « bombardé metteur en scène » du jour au lendemain et réalise dès le printemps 1964 son premier film (Patrouille en zone minée), qu’il tourne en Alsace. « Docu-fiction didactique », le film, découpé et filmé comme un film de guerre (cadrages avantageux, gros plans, suspense intensifié par des musiques d’ambiance empruntées à une musicothèque américaine), décrit le travail d’une patrouille en reconnaissance sur un terrain susceptible d’être miné.Quelques acteurs sont mêlés à de vrais soldats du 9e régiment du génie.

En octobre 1964 Claude Miller entame à Mourmelon la réalisation de son second film (Blindés face au danger aérien), qui décrit comment une colonne de chars doit se prémunir contre une attaque de chasseurs. Les moyens mis à disposition d’un jeune réalisateur faisant ses débuts cinématographiques sous les drapeaux sont considérables : pellicule couleur (16 mm), chars d’assaut, hélicoptères, images d’archives de vues aériennes, etc.

Mais il passe rapidement la main (sans doute même avant de commencer à tourner : le devis porte le nom du 2e classe They et le bon à tirer celui du capitaine de Heere), pour se consacrer à l’écriture et au découpage de son troisième film (Les Transmissions de la division 59) avec le concours du 53e bataillon de transmissions et un haut degré d’ambition (25 minutes filmées en 35 mm noir et blanc). Le film démontre l’importance stratégique des transmissions par estafettes, téléphonie ou voies hertziennes entre les postes de commandement lors d’une opération. 

Les prises de vues débutent le 22 janvier 1965 à Fribourg-en-Brisgau (Allemagne), avec des comédiens parmi lesquels on reconnait Gilbert Gil, grand second rôle du cinéma français, vu chez Cayatte, Guitry, L’Herbier, Delannoy, Ophuls ou Christian-Jaque. Démobilisé en février 1965, Claude Miller (qui a écrit le film et est mentionné comme réalisateur sur le devis) remet les clefs du film à son ami Bernard Stora, qui débute alors à l’ECA.

Tournage de Transmissions de la division 59, fin janvier 1965. De droite à gauche : Claude Miller (sous la casquette), Bernard Stora (qui a repris la réalisation après le retour de Claude Miller à la vie civile en février), l’adjudant-chef Jacques Questiau (cadreur), le premier maître René Autones (chef-opérateur), et à l’extrême-gauche un commandant qui était conseiller technique sur le film.