Depuis septembre 2022, Perrine Val est attachée temporaire d’enseignement et de recherche (ATER) à l’Université Sorbonne Nouvelle. De 2019 à 2022, elle était membre du projet de recherche européen ViCTOR-E (Visual Culture of Trauma, Obliteration, and Reconstruction in Post-World War II Europe), financé par le programme HERA (Humanities in the European Research Area).
C’est ce projet ViCTOR-E qui l’a amenée à explorer les fonds de l’ECPAD. Le projet s’intéressait à la place et au rôle du cinéma au cours de la Reconstruction qui a suivi la Seconde Guerre mondiale. À partir de films de « non-fiction » (documentaires, actualités filmées et films amateurs), il s’agissait de comprendre comment le cinéma a accompagné et documenté cette période de transition en Europe. Avec ses collègues allemands, italiens et tchèques, ils ont exploré plusieurs dizaines de lieux d’archives et ont regroupé un corpus de près d’un millier de films européens réalisés entre 1944 et 1956. Le but final du projet était la conception d’une exposition qui est désormais accessible en ligne et qui propose un parcours thématique permettant de visionner des extraits de ces films : https://www.victor-e.eu.
Parmi les fonds de l’ECPAD, Perrine Val s’est intéressée à une quarantaine de films réalisés entre 1944 et la seconde moitié des années 1950 qui montrent les différentes étapes de la Libération jusqu’à la reconstruction des infrastructures, principalement en France et en Allemagne. Cette sélection regroupe ainsi des films réalisés à l’été 1944 par les soldats alliés qui libèrent la Normandie et qui se rapprochent de films amateurs (avec aussi des images tournées dans différentes villes allemandes), des actualités filmées (Journal filmé de l’armée, Magazine du Service Cinématographique des Armées, Revue filmée de l’air, Actualités militaires françaises en Allemagne) et des documentaires réalisés par le SCA sur la Reconstruction (ports, aviation, chemin de fer, etc.) et par des sociétés étrangères (films américains en particulier).
C’était la première fois qu’elle consultait des fonds de l’ECPAD.
Les films tournés par les soldats alliés en Normandie l’ont beaucoup marquée : ce sont les toutes premières images tournées immédiatement après la Libération, les ruines sont encore fumantes, les soldats et les habitants apparaissent à la fois bouleversés et soulagés. Ces témoignages très bruts montrent la dureté des combats et annoncent l’ampleur des chantiers à venir.
Perrine Val porte un regard assez impressionné sur les fonds de l’ECPAD. Autant elle s’attendait à trouver de nombreux films sur la fin de la Seconde Guerre mondiale, autant elle a été étonnée de découvrir la multitude de films tournés par différents services de l’armée durant toute la décennie d’après-guerre. Pour les besoins du projet ViCTOR-E, elle a dû faire une sélection, mais c’était extrêmement précieux pour elle de pouvoir accéder à toutes ces images de l’après-guerre et de la Reconstruction.
Ces recherches lui ont permis de visionner un grand nombre de films qui fournissent pour certains des images inédites sur la fin de la guerre et la Reconstruction, et qui diffèrent aussi beaucoup des autres films de non-fiction tournés au même moment. Bien que les codes esthétiques soient proches, les films de soldats « amateurs » ou les actualités filmées de l’armée se distinguent beaucoup des films amateurs tournés par des particuliers (qui n’ont pas un accès aussi immédiat aux zones de combat ou à certaines infrastructures) et des reportages produits par Les Actualités françaises, Gaumont, Pathé ou Éclair.
Dans la perspective européenne et transnationale qui caractérisait le projet ViCTOR-E, il était particulièrement intéressant de découvrir par exemple le regard cinématographique porté par l’armée française sur l’Allemagne.