1/ Pouvez-vous nous raconter votre expérience de réalisateur au sein de l’ECPAD ?
J’ai eu la chance, à l’heure du service national, d’être sélectionné comme appelé à l’ECPA. À cette époque, le « C » correspondait au mot « cinématographique » et le « P » au mot « photographique » ce qui à mon sens définit bien ce qu’est cet établissement. Ce fut une chance. En effet, avec la confiance de l’officier qui dirigeait le magazine diffusé à la télévision, « Top Défense », j’ai immédiatement réalisé des sujets liés au monde militaire. Expérience aussi enrichissante que passionnante. J’y ai rencontré un grand nombre de jeunes gens animés par les métiers de l’audiovisuel : c’était comme le prolongement d’une école mais avec essentiellement des travaux pratiques !
Par la suite, une fois redevenu civil, l’établissement m’a proposé de réaliser d’autres films. Cette confiance accordée et ce cheminement ont été déterminants, je crois. J’y ai trouvé les sources d’inspiration de plusieurs fictions, mon premier film de fiction pour le cinéma notamment, Les Fragments d’Antonin, né d’un travail effectué sur les archives du Service de santé des armées (SSA) conservées par l’ECPAD. Et mon dernier De Gaulle, qui a certainement commencé à germer suite à la série de documentaires que j’ai réalisée sur la France libre pour le musée de l’Armée.
2/ Vous avez côtoyé les archives de l’ECPAD à différentes occasions. Pouvez-vous nous en dire un mot ?
Aller aux archives, physiquement, poser la galette de pellicule sur la table de lecture, allumer la lampe et voir apparaitre sur le verre dépoli des images saccadées venant du passé, mais terriblement vivantes, se retrouver seul, en tête-à-tête avec ces images, est une expérience forte, nourrissante. Pierre Nora dit que « l’image d’archive est ce qui reste de visible d’un monde devenu invisible »… J’ai toujours aimé ce moment, car le film commence à se construire là, malgré soi, on s’imprègne de ces images. Avec l’évolution des technologies, et notamment grâce à la numérisation des fonds, on peut faire la même chose depuis chez soi, ou depuis sa salle de montage. L’expérience est identique. Les archives s’imposent, les séquences auxquelles on ne pensait pas émergent, celles que l’on a imaginées se concrétisent.
Les images d’archives ont souvent balisé mon parcours. J’ai réalisé des documentaires qualifiés de « 100% archives », d’autres les utilisant ponctuellement. J’essaye toujours de les laisser vivre, respirer, trouver leur rythme. Elles ont une force, elles peuvent conduire le récit, même si parfois, c’est le récit qui les contraint.
J’ai également nourri certains de mes films de fiction avec de l’archive, qui perd son statut pour devenir image d’actualité, ce qu’elle était à l’origine. Le générique de mon premier long-métrage Les fragments d’Antonin est entièrement composé d’images d’archives de blessés psychiques après la Première Guerre mondiale. La première séquence nous montre, par la fiction cette fois, comment et par qui ces images ont été tournées.
Mon film Nos Patriotes s’ouvre également sur le tournage brutal, violent, par des opérateurs allemands, d’images d’actualité, relatant les combats de juin 1940.
Dans De Gaulle, j’ai mis en scène le gouvernement auquel participe de Gaulle, assistant, impuissant, à la projection d’images d’actualité montrant les Français sur les routes de l’exode…
Je pourrais poursuivre mais je résumerai en disant que d’une certaine façon, les archives m’ont appris aussi à regarder et à filmer.
3/ Parlez-nous de votre nouveau rôle d’administrateur au sein du conseil d’administration de l’ECPAD.
J’ai été très honoré lorsqu’on m’a proposé d’entrer au conseil d’administration de l’ECPAD. Cela m’a permis de mieux appréhender les différents domaines d’intervention de l’établissement, au-delà de mon propre secteur d’activité. C’est un véritable paquebot travaillant autour de l’image de la Défense et de la mémoire des armées. Mais pour l’instant nous n’avons eu que des réunions virtuelles, ce qui est très frustrant…